Deux enseignantes, Barbara Lefebvre et Anne-Sophie Nogaret, dénoncent la participation de hauts représentants de l’État à un colloque sur l’extrémisme organisé à Bobigny. Parmi les invités, la présence de certains militants indigénistes fait craindre selon elles un discours complaisant à l’égard du djihadisme.
Barbara Lefebvre est enseignante et essayiste, auteur de Génération «j’ai le droit» (Albin Michel, 2018) et C’est ça la France (Albin Michel, 2019).
Anne-Sophie Nogaret est professeur de philosophie. Elle a publié Du Mammouth au Titanic: la déséducation nationale (L’Artilleur, 2017).
Dans leurs efforts pour contrer l’islam politique et ses conséquences criminelles djihadistes, les pouvoirs publics sont souvent aveuglés par le double jeu et le double langage des interlocuteurs qu’ils cherchent, ou qui se présentent à eux avec des solutions clé en main. On a vu au cours des années écoulées les déconvenues coûteuses pour la puissance publique des programmes de déradicalisation, qui auront profité à des associations prestataires à l’honnêteté douteuse… pour une efficacité proche de zéro. L’écosystème associatif, tout comme l’écosystème universitaire, représentent en effet un vecteur idéal pour avancer ses pions, miner de l’intérieur l’État de droit et abuser l’opinion, ce dont ne se privent pas les islamo-indigénistes.
Ainsi, à la Bourse du Travail de Bobigny, les 3 et 4 juillet, aura lieu un colloque intitulé «Mécaniques de l’extrémisme violent», organisé par l’association «Sauvegarde de Saint-Denis», qui se présente comme «la première association de protection de l’enfance, de l’adolescence et de l’adulte dans le département, et plus largement d’aide et de soutien aux familles». Ce colloque s’ouvre par les prises de paroles de quatre représentants d’institutions majeures: le Comité Interministériel de la Prévention de la Délinquance et de la Radicalisation (CIPDR) dépendant du ministère de l’Intérieur et présidé par Édouard Philippe, la préfecture de Saint-Saint-Denis, le parquet de Bobigny et le Conseil départemental de Seine-Saint-Denis. Nous présumons que ces représentants de la République ignorent les sous-jacents idéologiques de leurs hôtes, et nous proposons de les éclairer afin qu’ils prennent leur responsabilité en légitimant de leur présence une telle assemblée.
Un des organisateurs du colloque n’est autre que le sociologue algérien Saïd Bouamama, fondateur avec Houria Bouteldja du Parti des Indigènes de la République. En 2010, il a co-écrit un livre-CD intitulé Nique la France, puis, plus récemment, publié un ouvrage au titre tout aussi poétique: Planter du Blanc ; chroniques du néocolonialisme français. Après avoir refusé de soutenir Charlie Hebdoaprès l’attentat de 2011 visant les locaux du journal, il ne s’est guère montré touché par le massacre du 7 janvier 2015: quatre jours après l’attentat, il rendait «les prises de position écrites ou dessinées» du journal responsables «de multiples agressions de femmes voilées et de nombreux actes contre des lieux de cultes musulmans». Saïd Bouamama par ailleurs n’a de cesse de vitupérer contre les lois de 2004 et 2010, qui interdisent le port du voile islamique à l’école et celui du niqab et de la burqa dans l’espace public, «lois islamophobes» selon lui produites par le «Racisme d’État».
Le discours idéologique récurrent dans les milieux indigénistes, fréristes et islamo-gauchistes consiste à déconnecter la radicalité islamique de sa source religieuse.
Sa présence, tout comme la lecture du programme et le titre même du colloque suscitent le doute: de quoi sera-t-il exactement question? De prévention de la radicalisation apparemment, ce qui n’est pas sans rappeler la déradicalisation, concept promu puis décrédibilisé par Dounia Bouzar et Sonia Imloul, qui se voit ici subrepticement reformulé. Des professionnels, psychologues et sociologues ayant étudié le phénomène auprès «d’islamistes signalés» viendront éclairer sur la question. Le programme du colloque comporte le terme de radicalisation, tout comme celui de dijihadiste, mais ces deux mots sont systématiquement mis entre guillemets. S’agirait-il de concepts sans contenu, dont on use par simple effet de mimétisme, mais ne renvoyant à aucune réalité? Car c’est le sens habituel de l’usage des guillemets… En réalité, le programme de ces deux jours de colloque consacré à la déradicalisation à la mode 2019 compte un point aveugle: l’islam politique.
En revanche, un médecin brésilien viendra parler de la violence des favelas et surtout le témoignage d’un «repenti de la suprématie blanche» (sic) pourra éclairer le public sur «la pluralité des radicalisations». Mais de «djihadiste», point. Sans doute le djihadiste français ne présente-t-il aucune spécificité par rapport aux autres «radicalités» exposées. Les morts et les blessés qu’il a causés sur le sol national ne méritent pas qu’on s’y attarde. Le discours idéologique récurrent dans les milieux indigénistes, fréristes et islamo-gauchistes est bien de déconnecter la radicalité islamique de sa source religieuse, relativiser cette violence politico-religieuse pour en faire une violence parmi d’autres.
Mais, si ce n’est de l’islam politique, d’où provient alors la violence djihadiste? Sans qu’elle soit exprimée telle quelle, la lecture du programme suggère une réponse en filigrane, motivée par les interventions annoncées de Saïd Bouamama ou de psychologues spécialistes du traumatisme post-colonial et transgénérationnel, comme Alice Cherki ou Malika Mansouri. Le djihad pourrait être l’effet boomerang de la violence coloniale subie par les ancêtres des actuels radicalisés. Exit la responsabilité des djihadistes, devenus simples jouets d’une histoire éprouvée inconsciemment. La boucle est bouclée: le djihadiste devient non seulement un malade psychique – en accord avec la rhétorique éculée du «déséquilibré» – mais aussi et surtout un malade historique, politique et social. Un irresponsable, donc, qu’il faut soigner par des outils «à la croisée du psychique et du social car chaque trajectoire humaine s’inscrit nécessairement dans un contexte social et politique» (sic). Par ailleurs, la présence parmi les intervenants d’avocats défendant les djihadistes ou militant pour leur retour en France, indique ce qui est sans doute l’objet véritable de ce colloque: une fois établi son caractère de victime, l’islamiste violent a droit de cité. Mieux encore, les institutions devraient consacrer tous leurs efforts à sa réintégration.
Il nous paraît inacceptable que des représentants de la République cautionnent une idéologie qui dénie la réalité qu’ils prétendent justement combattre.
Entendons-nous bien: il n’est pas question d’appeler à l’interdiction d’un tel colloque. Que ce petit monde organise des conférences, des réunions publiques, des spectacles-débats, publient des ouvrages et des revues, organisent des marches «citoyennes», signent des pétitions quasi quotidiennes contre le «racisme d’État» et son islamophobie atavique, c’est le jeu de la démocratie, celui de la liberté d’expression et d’opinion. En revanche, il nous paraît inacceptable que des représentants de la République cautionnent une idéologie qui dénie la réalité qu’ils prétendent justement combattre.
Nous appelons chacun à ses responsabilités. Ce colloque aura lieu sous l’égide de la préfecture de Seine-Saint-Denis, du CIPDR, de l’Université Paris-Descartes. Doit-on accepter la caution institutionnelle républicaine d’un tel colloque par les discours de Stéphane Troussel, président du Conseil départemental de la Seine-Saint-Denis, de Fadela Benrabia, préfète déléguée à l’égalité des chances de la Seine-Saint-Denis, de Fabienne Klein-Donati, procureur de la République du TGI de Bobigny et de Muriel Domenach, Secrétaire générale du CIPDR? Nous voulons croire qu’ils ignorent aux côtés de quels idéologues ils siégeront et espérons les avoir éclairés.
Si nous ne demandons en aucun cas l’annulation de ce colloque, nous attendons que les personnes qui nous représentent, qui sont des éléments importants de la République française de par leurs fonctions, leurs titres, leurs missions, se désengagent. Nous attendons qu’ils ne légitiment pas de leur présence les discours séparatistes et communautaristes des militants indigénistes et décoloniaux qui avancent masqués (ainsi, la biographie de Saïd Bouamama jointe au programme se garde bien de développer son pédigrée militant). À la puissance publique de ne pas être dupe. À moins qu’elle ne soit complice, en dépit de ses discours de fermeté?
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Saïd bouamama ce n’est pas un doigt qu’il faut lui mettre, plutôt un saucisson ou mieux un jambonneau entier 100% pur porc ?
Devoir laïque de citoyen français..
Elle appréciera.