En quête de nouveaux financements, les talibans afghans ont décidé d’imposer une « taxe de protection » aux opérateurs de téléphonie mobile, menaçant l’un des rares secteurs lucratifs en Afghanistan, révèlent des sources talibanes et d’entreprise.
La direction du mouvement a formellement réclamé cette « taxe » à quatre opérateurs lors d’une réunion secrète organisée le mois dernier dans la ville pakistanaise de Quetta, où sont installés de nombreux cadres talibans. En contrepartie, elle s’est engagée à ne pas s’en prendre à leurs employés et à leurs infrastructures.
Les talibans se sont inspirés d’un véritable impôt mis en place en octobre par le gouvernement afghan, qui lui a rapporté une manne de 78 millions d’afghanis (1,14 million de dollars) en quelques jours, selon deux cadres de sociétés de télécoms ayant assisté à la réunion de Quetta, ainsi qu’un troisième au fait du dossier.
« Ils (les talibans) veulent que nous leur versions la même somme qu’au gouvernement », a dit un de ces cadres sous couvert de l’anonymat. « Nous leur avons dit que cela coulerait nos affaires, mais ils nous ont répondu : c’est le seul moyen de vous assurer que vos employés ne soient pas attaqués et que vos infrastructures ne partent pas en flammes ».
Une source au sein de la choura de Quetta, l’organe central des talibans, a confirmé ce projet et indiqué que les insurgés attendaient la réponse des opérateurs. « Nous leur avons dit : nous avons le droit de vous taxer pour protéger vos tours (de transmission) en Afghanistan. Vous devez payer », a expliqué ce cadre taliban.
Les insurgés islamistes ciblent depuis longtemps les opérateurs de télécoms privés. Ils ont par le passé enlevé des ingénieurs, détruit des tours de transmission et forcé les compagnies à suspendre leur couverture dans certaines zones pour éviter à leurs membres d’être repérés par les autorités.
Mais une telle dîme serait une nouveauté et montre que la direction talibane se comporte de plus en plus comme un « gouvernement fantôme ». Elle vise apparemment à pallier la baisse des sources de revenus traditionnelles des talibans – notamment la production d’opium – à un moment où ils sont à la fois engagés dans une vigoureuse offensive hivernale contre les autorités et aux prises avec leur rival, le groupe Etat islamique.