L’insurrection djihadiste en Irak va-t-elle rebattre tous les jeux d’alliances au Moyen-Orient ?
Nous sommes peut-être en train d’assister à un grand renversement d’alliances des Etats-Unis et de l’Occident dans la région. L’Arabie saoudite n’est plus la solution mais le problème, car, avec le Qatar, elle a trop financé l’islamisme sunnite radical, quand elle ne l’incarne pas ! On devrait donc voir un basculement des Occidentaux en faveur d’un soutien à l’Iran. Au fond, sur le plan énergétique et militaire, l’Iran pourrait tout à fait remplacer l’Arabie saoudite. Il y a une tonalité nouvelle avec les Iraniens depuis l’élection de Rohani et l’ouverture de négociations sur le nucléaire. Or, pour Téhéran, le maintien d’un régime chiite en Irak est fondamental et sa ligne rouge est la chute de Bagdad. Mais l’armée iranienne est exsangue à cause des sanctions internationales. Si elle doit intervenir, elle le monnaiera chèrement. Tout comme les Kurdes d’ailleurs. En tout cas, aucun pays occidental, et surtout pas les Etats-Unis, ne veut envoyer de troupes au sol.
Faut-il s’attendre à une partition de l’Irak ?
Depuis 1991, le clivage entre Kurdes et Arabes s’était déjà aggravé, mais, désormais, l’autre déchirure, entre Arabes sunnites et chiites, est plus grave encore, bien plus que le conflit israélo-arabe.Et elle traverse l’Irak bien entendu.
Il est donc fort possible que nous allions vers trois Irak : Le Kurdistan au nord, avec Kirkouk en prise de guerre, le Centre sunnite et le Sud chiite. Après tout, l’Irak est une récente – et aberrante – création coloniale britannique.
Qu’est-ce que cela signifie pour les autres puissances régionales, Israël et la Turquie notamment ?
Vous savez, Israël n’a jamais été en guerre avec la République islamique d’Iran depuis 1979. Pour les Israéliens, l’islamisme radical sunnite est un danger existentiel bien plus important que l’Iran, sauf si ce dernier devenait une puissance nucléaire. Si Téhéran renonce à cela, elle pourra compter sur la neutralité bienveillante d’Israël. Quant à la Turquie, elle peut abandonner son rêve de grande puissance régionale : sa politique étrangère est un échec total. On a maintenant un quasi-état de guerre entre Ankara et Damas, et Erdogan, le Premier ministre turc, peut craindre une montée en puissance légitime de l’indépendantisme kurde. Le XXIe siècle moyen-oriental sera celui des Kurdes…
Frédéric Encel (Docteur en géopolitique et professeur à l’ESG Management School
Brillante élucubration d’Obama: renverser les alliances, et se jeter dans les bras de l’Iran nucléaire pour contrer le Daesh: c’est aussi avisé que Gribouille se jetant à l’eau pour ne pas être mouillé par la pluie.