Le déroulement du conflit entre Israël et le Hamas aurait peut être pris une autre tournure si le patron de l’organisation terroriste Khaled Masheaal, ayant refusé toute tentative de compromis, n’avait pas jadis survécu à un attentat perpétré par Israël. Il s’en souvient très bien et donc préfère se sentir en sécurité au Qatar.
Bref rappel : à Amman, des agents du Mossad lui avaient injecté un poison mortel, mais il s’en est sorti de justesse grâce à l’antidote fourni aussitôt par Israël, sous la menace du Roi Hussein de Jordanie de rompre les relations diplomatiques avec Jérusalem.
Selon le même compromis, les agents du Mossad ont été autorisés à rentrer chez eux, alors que l’ancien chef du Hamas Ahmed Yassine avait été libéré de la prison Israélienne et renvoyé à Gaza, où par la suite il a été ciblé.
Actuellement, il s’est trouvé dans l’obligation d’accepter le cessez-le-feu actuel face aux souffrances des habitants de Gaza et aux défaites du Hamas.
Pour l’instant la trêve entre Israël et le Hamas est maintenue. Arrivera-t-elle au terme des 30 jours prévus? Le Hamas respectera-t-il, pour changer, le cessez-le-feu? Pour une fois la logique répond par l’affirmative. Mais au Moyen Orient, la logique n’est pas forcement logique..
Or, comme à l’issue de toute confrontation, c’est l’heure des bilans. Qui a gagné, qui a perdu? Ou est ce le match nul? La réponse varie selon le point de vue des parties. Pour le Hamas, prenant ses désirs pour des réalités, il a triomphé de « l’armée sioniste ennemie ». Une fois de plus, les arabes tiennent à leur orgueil plus qu’à la réalité. En plein milieu des sinistres ,et ignorant la tragédie infligée aux citoyens de Gaza, alors qu’eux mêmes se tenaient en sécurité dans des abris sous-terrain, les dirigeants du Hamas fanfaronnaient, en bonne méthode Coué.
Ceci est le point de vue subjectif. En revanche, selon le point de vue pratique et objectif, le bilan est tout opposé. Selon le premier ministre Israélien Netanyahu » Le Hamas a subi des coups très durs. Les plus importants depuis sa création. Il a accepté le cessez-le-feu sans obtenir une seule de ses revendications initiales.Il voulait un port, un aéroport, la libération des prisonniers palestiniens, une médiation du Qatar, puis de la Turquie, le paiement des salaires de ses fonctionnaires. Il n’a rien obtenu. La reconstruction de Gaza se fera pour des raisons humanitaires, uniquement sous notre contrôle. »
Pourtant, l’opinion publique , voire une partie du gouvernement et de la coalition, ne partagent pas forcement cette satisfaction. Certains ministres estiment qu’il fallait « aller jusqu’au bout » – sous-entendu occuper la zone de Gaza et en finir avec le Hamas. Attitude partagée par bon nombre d’Israéliens.
En effet, des sondages en disent long: seules 32% des personnes interrogées se sont déclarées satisfaites de la gestion du conflit, contre 59% de mécontents qui estiment également qu’Israël est le grand perdant de cette guerre. 54% rejettent l’accord de cessez-le-feu. Dans un autre sondage, à la question: « Quel est le vainqueur de l’opération Bordure protectrice? » 25% se prononcent pour le Hamas, 32% pour Israël et 26% ni pour l’un, ni pour l’autre. Et puis 37% pensent que la trêve tiendra moins de six mois; 22%, un an et 13% seulement plus de deux ans.
Ceci également est un jugement passionnel et non cérébral, résultant d’une profonde méfiance à l’égard du Hamas, et des attaques répétées en provenance de Gaza. Les précédents donnent raison à cette méfiance: toutes les trêves avaient été rapidement violées par l’organisation terroriste.
Cette méfiance est doublement compréhensible de la part des habitants du sud, tout le long de la bande de Gaza, vivant à deux ou trois kilomètres des mortiers du Hamas, menace non déjouée, contrairement au « Dôme d’acier » ayant neutralisé le tir des missiles. Ayant perdu la confiance, de nombreuses familles ont quitté leurs villages et trouvés refuge plus au nord. Or, même avec l’annonce de la trêve ils ont hesité avant de regagner leurs foyers, ce qui constitue une première dans les annales des guerres d’Israël.
Si l’on veut dresser un bilan objectif, il semble que le Hamas est le grand perdant:
– D’abord, les tunnels d’attaque, arme secrète et véritable menace stratégique, ont été en majorité détruit
– Ensuite, l’arsenal des missiles, toujours existant, est nettement réduit. Pour reconstituer des tunnels et des missiles il faudrait plusieurs années et du matériel dont Israël entend empêcher l’acheminement en contrôlant les accès; l’arsenal militaire est touché durement
– Enfin, certains dirigeants militaires ont été ciblés.-
Sur le plan diplomatique, le Hamas se trouve plus isolé que jamais, soutenu uniquement par l’Iran et le Qatar, mais rejeté même par la plupart des pays musulmans. A ce propos, il convient d’avoir à l’esprit une note en sourdine venant de Jérusalem, laissant deviner une nouvelle constellation dans la région, voire de nouvelles alliances, ne serait-ce que tacites.
Ceci dit, ni le Premier Ministre Netanyahu, ni le Ministre de la défense Yaalon, ni le chef d’Etat Major Gantz ne prennent le risque de s’engager, voire de promettre, une accalmie définitive. Et ils le déclarent clairement et sincèrement. Est ce donc, comme le craint l’opinion publique, partie remise?
Bref, les événements dans cette région troublée se suivent et se ressemblent.
Une hypothèse personnelle: il se peut que Tsahal fut content de se débarrasser du fardeau du Hamas afin d’être paré à toute menace éventuelle venant du nord. En effet une série d’incidents, bien qu’isolés et mineurs, éveille une certaine inquiétude, et notamment la conquête par les rebelles syriens du poste frontière de Kouneitra, adjacent à courte distance du Golan Israélien, et servant pour le passage des soldats de la Finul, chargés de superviser l’armistice entre les deux pays. D’ailleurs, plusieurs « casques bleus » de l’ONU sont portés disparus, et l’on craint pour leur sort. Certes, les habitants du Golan sont sereins et confiants. Mais pour combien de temps?.
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GIL KESSARY – Brève biographie
Israélien deuxième génération , Journaliste francophone, ayant collaboré longtemps au journal israélien « Maariv », ainsi que dans la presse française notamment « L’Aurore » puis « Tribune Juive ». Enfance, adolescence, jeunesse et service militaire en Israël. Diplôme de Sciences Po. Droit international public Paris, licence de droit de l’Université de Jérusalem. Ancien diplomate à l’Ambassade d’Israël à Paris.
AAM Israël HAY FOR EVER.