Guy Millière: J’ai publié, voici quelques années, un livre que j’avais rédigé avec des amis juristes. J’avais décidé de l’appeler « Avancer vers l’État de droit ».
J’avais choisi ce titre parce qu’il me semblait important de rappeler un fait flagrant et grave : la France n’était pas, et n’avait jamais été, un État de droit au sens strict du terme, c’est-à-dire un pays où les principes fondamentaux du droit sont considérés comme ayant été mis au jour, posés depuis là comme une garantie intangible, et respectés.
J’y soulignais la confusion du droit avec la loi qui est de mise dans ce pays depuis plus de deux siècles, et qui explique l’extrême instabilité institutionnelle qui prévaut depuis la Révolution française.
J’avais choisi ce titre aussi parce que j’avais à l’époque encore un mince espoir : pouvoir contribuer à ce que le pays avance, malgré tout, vers un fonctionnement d’État de droit. Depuis, j’ai perdu ce mince espoir. Ce, pour une raison simple : la régression s’est poursuivie et atteint aujourd’hui des proportions cataclysmiques.
Qu’une, deux, trois, cinq personnes de plus soient tuées ne change quasiment rien à la peine
Non seulement des droits fondamentaux, tels que le respect de la présomption d’innocence sont sans cesse bafoués, sous la forme des contrôles d’identité et des contrôles routiers incessants, mais les coupables dont il est avéré qu’ils sont coupables ne sont pas condamnés, ou très peu. L’idée, essentielle pour la justice, que le châtiment doit être proportionné par rapport au crime commis se trouve perdue : les condamnations à la perpétuité réelle n’existent pour ainsi dire plus, même pour les assassins récidivistes, et qu’une, deux, trois, cinq personnes de plus soient tuées ne change quasiment rien à la peine qui peut se trouver infligée.
Il existe des cas où un assassin jugé pour un premier assassinat et condamné à une lourde peine n’a pas vu sa peine aggravée lors d’un jugement pour un deuxième assassinat – tout simplement parce que la peine infligée lors du premier jugement était déjà la peine maximale.
On doit noter aussi que des milliers de peines de prison prononcées chaque année ne sont pas exécutées, parfois faute de place dans les prisons, parfois aussi parce que des peines de substitution sont proposées qui, souvent, sont l’équivalent d’une absence de peine.
Un chrétien sera plus lourdement condamné qu’un musulman de quartier « sensible »
On doit noter enfin que des peines pourront être décidées en fonction de la situation sociale du prévenu, ou du risque de troubles susceptibles de survenir en cas de condamnation : un chrétien appartenant à la classe moyenne sera plus aisément et plus lourdement condamné que, disons, un musulman venant d’un quartier dit « sensible » dont l’incarcération pourrait déboucher sur des émeutes, des incendies, des mises en état de siège de commissariats ou de quartiers entiers.
On doit ajouter que des pans entiers du système judiciaire sont aux mains d’organisations de gauche ou d’extrême gauche pour qui le criminel est avant tout une victime d’une société injuste et, dès lors, non coupable, ou quasiment non coupable par définition.
Nous en sommes à un stade où on doit dire que la France est un État de non-droit, un État qui, à la faillite économique, ajoute une dislocation sociale graduelle et le spectre d’une faillite morale.
Des livres viennent parfois rappeler cette faillite morale. C’était le cas, voici quelques mois, de « France Orange mécanique*».
C’est le cas aujourd’hui de « Quand la justice crée l’insécurité*». Le titre peut sembler excessif : il ne l’est pas. Le système juridique et judiciaire français crée effectivement l’insécurité, alors que son rôle devrait être inverse. Ce faisant, il contribue à la destruction de la liberté, car il n’est pas de liberté possible sans sécurité des biens et des personnes. Nous sommes tous dans une situation de liberté précaire et provisoire. Cela ne semble pas près de s’arranger.
L’auteur du livre, Xavier Bébin, est secrétaire général de l’Institut pour la justice. C’est un homme qui se bat. Je crains que son combat soit désespéré. Je n’en tiens pas moins à lui dire ici mon profond respect.
© Guy Millière pour Dreuz.info.
Tout étant relatif en ce bas monde, l’affirmation de Guy Millière « La France n’est pas un Etat de droit » devrait être complétée par la question : « comparée à qui ? ».
Car, à bien y regarder on constate que la France est au moins autant un Etat de droit que tous les pays comparables, souvent occidentaux ; et bien plus que la majorité des pays de la planète.
En effet, nonobstant les reproches, souvent justifiés, que l’on pourrait formuler à l’égard de la France dans ce domaine, on aurait du mal à trouver un pays qui l’est davantage.
Et certainement pas les USA du temps de GW Bush, référence préférée de Guy Millière. Parlons-en, du « Patriot Act » qui limite sérieusement les droits citoyens ; de Guantanamo, où des centaines de prisonniers sont toujours enfermés, sine die, alors qu’il n’y a aucune accusation à leur encontre et aucun procès ne leur sera jamais intenté ; des condamnés à mort avérés innocents après l’exécution etc…
Et si on évitait pour une fois de cracher dans la soupe ?
Quand on parle de droit et de loi, on est rigoureux. Si Guy Millière avait dit « le droit en France est à géométrie variable », lui auriez-vous rétorqué que nous n’avons pas à rougir de notre aviation ?
Celui qui subit une injustice est-il bien avancé de savoir qu’ailleurs, c’est pareil ou pire ?
Il y a deux façons d’aimer son enfant : lui passer tout tant il est chérissable ou bien l’éduquer en établissant des lignes rouges pour en faire un homme (ou une femme) digne de ce nom. Pourquoi GM n’aimerait-il pas sa famille et la France de la même façon ?
Les réactions épidermiques faussent les débats et mettent hors-sujet.
Par ailleurs, avec le recul, que Guatanamo soit un scandale ou pas, l’antiaméricanisme à l’échelle planétaire – quand il est primaire – est aussi dévastateur que l’anti-israélisme dont on constate, quand on prend la peine d’aller au fond des choses, qu’il est associé à un véritable complot à dominante antisémite.
La planète s’est longtemps mobilisée contre les deux Satan – US et Israël – Il lui était alors très facile de mettre GWB en difficulté du fait qu’il n’y avait plus aucune trace d’armes chimiques en Irak. Aujourd’hui, il est question de détruire l’important stock d’armes chimiques sur le sol Syrien; n’est-il pas permis de partager un doute… à plusieurs… quand on prend la mesure du pouvoir affolant des médias sur les évènements ?
Mr MOLIERE avait raison , ces tartuffes du trop politiquement correcte sont à coté de leurs pompes. Je suis parti en retraite anticipée car j’étais révolté des décisions judiciaires que l’on m’obligeait à appliquer . Mr MILLIERE dit la vérité sur les sanctions appliquées par les juridictions en France. Il n’est pas informé de l’antisémitisme grandissant dans l’administration de notre pays. Comme disait l’autre » la France a la mémoire courte » .