(La carcasse de L’Institut d’Égypte)
Fondé, en 1798 par les scientifiques qui accompagnaient Napoléon lors de son invasion de l’Égypte et auteur de la monumentale Description de l’Égypte (1809-1828) en 20 volumes, l’Institut d’Égypte a été incendié complètement le 17 décembre par des foules déchaînées, à proximité du bâtiment de l’Assemblée nationale.
(Page de couverture du premier volume de la Description de l’Égypte (1809)
Fait étonnant pour une institution savante, ses portes étaient ouvertes au public afin de flâner et de s’imprégner de l’air ambiant, mais bien peu l’ont fait. Durant mes trois ans de résidence au Caire dans les années 1970, [l’Institut] m’a servi à la fois comme lieu de refuge, lorsque j’en avais ras-le-bol de la ville, et comme l’endroit où immanquablement j’emmenais mes visiteurs étrangers. Je chérissais ce joyau peu connu pour sa bibliothèque de 200 000 volumes essentiellement axés sur l’Égypte, pour le fait qu’il symbolisait le chef-d’œuvre de l’érudition orientaliste en Égypte, pour son évocation d’une époque, et pour la quiétude qu’il offrait dans une ville qui a si peu d’oasis de ce genre.
Et maintenant, les barbares sont venus et l’ont détruit à coups de cocktails Molotov. Les murs sont encore debout, mais le bâtiment est éventré, son contenu inestimable brûlé.
Commentaires : (1) Cette attaque rappelle une foule d’actes antérieurs de destruction des monuments historiques en Égypte, y compris la dégradation médiévale du Sphinx et l’incendie criminel du Caire de 1952.
En dehors de l’Égypte, les agressions venant directement à l’esprit, comprennent la destruction musulmane de l’Inde, la destruction turque des églises dans le nord de Chypre, le pillage palestinien de la Tombe de Joseph, la destruction par les talibans du Bouddha de Bamiyan, le pillage irakien de musées, bibliothèques et archives, la destruction saoudienne d’antiquités à la Mecque, et la destruction malaisienne d’un temple historique hindou.
En d’autres termes, cette barbarie s’inscrit dans une tendance plus générale. Qu’en est-il des musulmans et de l’histoire ?
Comme cette liste le suggère, un trop grand nombre d’entre eux détestent, non seulement ce qui est non islamique, mais même leur propre patrimoine.
(2) L’ancien ministre d’État aux Antiquités, Zahi Hawass, a fait campagne pour le retour des trésors du pays. Je vote contre cela. C’est mieux qu’ils soient en sécurité là où ils sont plutôt qu’exposés à la furie des Égyptiens des temps modernes, surtout étant donné que le mufti d’Égypte a récemment statué contre l’exposition de statues à usage privé, une première étape possible vers la destruction des antiquités égyptiennes sanctionnée par l’État.
En outre, les observateurs, à juste titre, craignent que l’incomparable musée égyptien puisse être la cible prochaine.
Source : Daniel Pipes, Version originale anglaise: L’Institut d’Égypte – In Memoriam
Adaptation française : Anne-Marie Delcambre de Champvert