Alors que le monde est en pleine tourmente avec la course effrénée de l’Iran vers la bombe atomique, « l’automne islamiste » et la crise économique mondiale, le conflit israélo-palestinien reste encore le plus sûr moyen pour détourner l’attention du plus grand nombre des leurs vrais problèmes. Le dernier avatar en date est la reconnaissance de l’Autorité Palestinienne (AP) en tant que membre à part entière par l’UNESCO, l’Agence des Nations Unies pour l’Education, la Science et la Culture.
Bien qu’il soit prouvé que Ramallah « ne respectait pas les normes éducatives de l’UNESCO » comme le rapporte l’Institut Impact de recherche sur la tolérance et la paix, 107 pays sur 195 ont donné un avis favorable, dont la France, la Grèce, l’Irlande, la Russie et la Turquie. Seuls 14 états s’y sont opposés, comme l’Allemagne, l’Australie, le Canada, les Etats-Unis, et Israël, et 74 se sont abstenus.
L’argument généralement avancé pour justifier cette reconnaissance est la promotion du « processus de paix actuellement au point mort ». Vu le contexte mondial, on peut légitimement s’interroger sur le bienfondé, et surtout les conséquences potentielles d’un tel choix.
Tout d’abord, ce n’était pas à l’UNESCO, un forum dédié à « la promotion de l’Homme », de traiter d’un tel sujet, mais à l’ONU où un processus d’adhésion est en cours d’examen. En devenant une arène politique, l’UNESCO en subit désormais les répercutions. Après la décision des USA et du Canada de ne plus verser leur contribution financière, la directrice générale Irina Bokova a annoncé que « l’Organisation suspendait tous les programmes jusqu’à la fin de l’année ».
Cette adhésion, n’a pas fait avancer la création d’un état palestinien sur le plan des instances internationales. Au contraire, l’AP qui souhaitait adhérer dans la foulée aux 16 autres agences des Nations Unies, telle l’AIEA, s’est fait tancer comme un mauvais élève par Ban Ki-moon qui juge cette démarche ni « bénéfique pour la Palestine ni personnes ». Quant, au Conseil de Sécurité de l’ONU, les USA n’auront probablement pas à se servir de leur véto, car « l’AP ne disposerait pas des 9 voix sur 15 qui auraient permis au comité des admissions de formuler une recommandation favorable ».
Au sein de la famille palestinienne divisée, cette course à la reconnaissance ne fait pas non plus l’unanimité. Et bien que régulièrement annoncée, on ne croit guère à la réconciliation des frères ennemis que sont l’AP et le Hamas, d’autant plus que ce dernier vient de se voir renforcer politiquement par la libération des 1027 prisonniers suite à l’accord Shalit. Mais si accord il devait y avoir, le Premier Ministre Salam Fayyad, l’architecte de « l’embellie des territoires », risquerait bien d’en faire les frais. Que resterait-il alors du projet de développement économique et de la mise en place d’institutions modernes, fers de lance de la construction du futur état ?
Quant à la paix, sur le terrain la situation déjà complexe s’est encore envenimée. D’autant plus que le Djihad islamique manipulé par l’Iran vient jeter de l’huile sur le feu avec une nouvelle « pluie de missiles » sur Israël. En l’absence de négociations, les démarches unilatérales à l’ONU et l’UNESCO sont perçues comme des agressions par l’état Hébreu. En rétorsion, Benjamin Netanyahou a autorisé la reprise des constructions dans les blocs d’implantations comprises dans le « consensus accepté par les deux parties » ainsi qu’à Jérusalem, et a gelé temporairement le transfert de fonds dus à l’AP.
Ce nouveau statut conféré par l’UNESCO, génère un autre type de confrontation, ce que l’on pourrait appeler une « intifada culturelle ». Moins d’une semaine après leur admission, la première décision de l’AP a été de revendiquer la propriété du Caveau des Patriarches et de préparer des dossiers afin de poursuivre Israël devant les tribunaux internationaux « pour destruction de la culture palestinienne et islamique à Jérusalem » et pour « changement du caractère palestinien et islamique de lieux saints ».
Quand on énumère ainsi les conséquences néfastes de cette entreprise, on s’aperçoit que cela n’avait rien d’anodin. Alors pourquoi s’être engagé dans cette voix ? Pour les palestiniens et leur « majorité automatique » c’était très probablement un moyen détourné pour forcer la main du Conseil de Sécurité. Force est de constater qu’ils n’ont pas atteint leur objectif. Pour les autres pays favorables à l’adhésion, on peut avancer qu’ils ont considéré un vote positif à l’UNESCO comme un moindre mal, leur permettant ensuite de s’opposer ou de s’abstenir à l’ONU.
Qu’en est-il de la France, en particulier, dont la position en a surpris plus d’un ? Le Président Obama avoue avoir été « déçu par la décision de Paris ». Les israéliens n’ont pas mâchés leurs mots. Certains encore, ont voulu voir là le résultat malencontreux de deux politiques contradictoires, d’une part la « politique arabe » traditionnelle du Quai d’Orsay, et d’autre part, une innovation de l’ère Sarkozy, une « politique d’ouverture vers Israël ». Ce qui a fait dire à d’autres qu’ « à vouloir donner des gages à chacun, on finit par mécontenter tout le monde ». Il est probable qu’il faille un peu plus qu’une lettre personnelle à Benjamin Netanyahou pour dissiper tous les malentendus.
Quant à l’Europe, elle a manqué là un rendez-vous majeur en n’adoptant pas sur le dossier une position commune. En outre, les pays ayant soutenu l’adhésion risquent d’être considérés par l’état Hébreu comme n’ayant pas adopté une position équilibrée, ce qui les empêchera à l’avenir de revendiquer un rôle d’arbitre auquel tient tant l’UE.
En définitive, cette reconnaissance internationale, ne va en rien promouvoir « la création d’un état palestinien vivant en paix avec ses voisins » qui dépend avant toute chose d’un accord avec Israël. A moins d’un changement radical du contexte, possiblement lié à une réduction de la capacité de nuisance de l’Iran, qui permettrait un retour à la table de négociation sans conditions préalables, on ne voit pas comment les différents protagonistes pourraient s’entendre et entamer un dialogue constructif. Alors, pour répondre au questionnement initial : impasse ou boite de pandore ? Il est malheureusement facile de répondre : impasse pour les palestiniens et boite de pandore pour les conséquences néfastes sur le processus de paix et la stabilité régionale.
© Pr Hagay Sobol Europe Israël – reproduction autorisée avec un lien vers la source
Pr Hagay Sobol
Professeur des Universités, Docteur en Médecine et Sciences.
Président du Centre Fleg Marseille, Membre du comité directeur du Crif Provence
et du comité régional Provence du FSJU
Membre du Collectif « Tous enfants d’Abraham »
Article publié dans la revue Lev Hair Magazine N°15 : http://fr.calameo.com/read/000220566a233985a5470