“Pourquoi Israël n’en a rien à faire de la paix ! », ce grand titre tapageur faisait la couverture du Time Magazine, il y a quelques mois, stupéfiant tous ceux qui ont la moindre connaissance d’Israël, ou du journalisme, tout simplement. Pas seulement parce que l’article de Karl Vick, rédigé depuis Jérusalem, ne rapportait rien qui semble vrai.
Mais nombreux sont ceux qui ont été choqués par le titre simpliste et cynique de la couverture, parce qu’il flirtait allègrement avec la calomnie et l’accusation rituelle qu’Israël seul était responsable de l’absence de paix au Moyen-Orient, tout en passant sous silence les actions répétées prises par Israël pour la cause de la paix, tandis que les cercles dirigeants arabes et palestiniens agissaient de façon hostile et réitérée contre Israël, à la même époque…
Le scandale était encore aggravé, sachant qu’une telle couverture (illustrée par une énorme étoile de David), lue par des millions d’internautes et d’autres – c’est-à-dire bien au-delà du nombre de souscripteurs du magazine lui-même- déforme les perceptions de tous ceux qui en prennent connaissance, en leur apportant sa coloration particulière. Les reportages sur le Moyen-Orient affectent les attitudes des décideurs politiques, des universitaires, des leaders syndicaux, des officiels des églises, des étudiants, et même des jeunes enfants. Ce n’est, peut-être, pas si surprenant qu’autant d’universitaires (et non pas seulement une poignée de politiciens) soient aussi profondément anti-israéliens, ni même que beaucoup d’étudiants juifs et d’enfants (et pas seulement quelques adultes) aient de plus en plus de mal à s’identifier avec Israël, ou même en tant que Juifs, lorsqu’ils entendent de quelle façon (selon les médias) de méchants Israéliens tuent des conducteurs de bulldozzer palestiniens (à Jérusalem), blessent des enfants innocents, volent des terres et empêchent les étudiants palestiniens de voyager à l’étranger, puisque c’est ce qui suinte des reportages produits à travers le monde entier. Par contre, une présentation des faits légèrement plus nuancée apporte une impression très différente : ce fameux conducteur de bulldozer était en train de crier « Allah W’Akbar » en fonçant avec son engin sur les piétons et en écrasant des voitures ; ces enfants innocents ont été tués par l’explosion d’engins piégés du Hamas, le territoire prétendument « volé » en question est temporairement réquisitionné pour y dresser une barrière de sécurité provisoire empêchant les terroristes d’accéder aux centres peuplés d’Israël, et les étudiants en question se sont vus refuser leur visa par le Département d’Etat américain parce qu’ils représentaient un risque sécuritaire (terroriste). Malheureusement, les reportages sur ces sujets et bien d’autres, dès qu’il s’agit d’Israël et du Moyen-Orient, manquent souvent de lien au contexte de l’action, de connaissance de l’arrière-fond culturel et d’équilibre, autant que de la nuance nécessaire pour que le public consommateur de médias puisse avoir une compréhension complète de la réalité sur le terrain. Comment on adopte un récit ou « narratif ».De quelle façon les medias en sont arrivés à ce point? Est-ce que tout le personnel des rédaction hait à ce point les Juifs ? Peut-on croire qu’ils soient tous farouchement anti-israéliens et complices consentants de la campagne de guerre psychologique de l’Iran, du Hamas et du Hezbollah, visant à détruire l’Etat d’Israël ? Non, ce n’est pas le cas, ils n’en sont pas là. Mais en observant le processus mis en perspective, notons qu’il n’y a pas plus d’une génération, les leaders d’opinion européens dans les médias et les universités sont entrés dans un processus d’acceptation du « narratif palestinien », qui inclut de délégitimer et de diaboliser Israël et ses dirigeants. Aujourd’hui, la plupart des dirigeants européens et des universitaires, nourrissent des représentations d’un Israël impérialiste et raciste, en tant que l’un des pires violateurs des droits de l’homme, perçoivent Israël comme intrinsèquement mauvais, comme le reflètent de récents sondages d’opinion, à travers l’Europe, désignant Israël comme la menace dominante contre la paix mondiale sur la planète, avec les Etats-Unis comme second de ligne. De fait, la plupart des Européens, aujourd’hui, perçoivent le fait de questionner la légitimité d’Israël comme une part « raisonnable » du discours public. Cela arrive, également, en Amérique du Nord, actuellement. Dans de nombreux quartiers, cela a permis de développer des biais de ce genre, désormais institutionnalisés, y compris au sein de l’Establishment des politiques étrangères à Washington, des Think-Tanks et des Institutions universitaires, dans la hiérarchie des églises et même au sein de la Communauté juive et de ses cercles dirigeants. Le milieu intellectuel au sein de laquelle opère l’élite américaine en est venu, lentement, à ressembler à l’état d’esprit européen d’il y a deux décennies – non pas anti-israélienne au point d’exiger sa destruction, mais dans le sens d’accuser Israël pour l’absence de paix dans la région, de diaboliser les tentatives d’Israël de se défendre, et de questionner la Justice dans l’établissement d’Israël. Les cercles intellectuels dirigeants de l’Amérique actuelle aimeraient que ses citoyens pensent que la principale cause, ici, est l’absence de paix à cause des « implantations israéliennes illégales », ou « de l’occupation », ou « du Mur –de séparation ». Ou, dans de plus en plus de cercles, il n’y a pas de paix à cause du fait que l’Etat Juif insiste sur son identité juive –la raison d’être de sa fondation, telle qu’elle s’exprime dans les résolutions de l’ONU et comme il est accepté dans sa reconnaissance par les Etats-Unis et tous les pays extérieurs au monde arabo-musulman. Peu importe que l’obstacle fondamental à la paix au Moyen-Orient demeure tel qu’il a été depuis au moins 100 ans, le rejet constant et violent de tout lien juif avec cette terre, refusant toute légitimité à la fondation d’Israël, par tous les dirigeants de la plupart des sociétés musulmanes, arabes et palestinienne. Tout cela a conduit à la situation dans laquelle l’existence d’Israël est désormais soumise à débat, non seulement à Oxford, mais également à Harvard et Yale, alors que les appels à son démantèlement ne semblent plus « dépasser les bornes ». De telles exigences sincères à l’élimination d’un pays membre de l’ONU, cependant, devraient préoccuper tous les peuples et nations un tant soit peu civilisées. Un langage qui se prête aux distorsions.Les mots ont une signification, une puissance (évocatrice), une influence et l’exemple ci-dessus, du titre choisi par le Time est instructif. L’article lui-même, contient quelque chose de parfaitement critiquable, par ses références répétées à des Israéliens essentiellement préoccupés de faire de l’argent, mais surtout, passe à côt é d’un point essentiel : la raison pour laquelle les Israéliens peuvent apparaître sceptiques quant aux perspectives de paix, est, en partie une conséquence de l’hostilité continuelle et très ouvertement publique du leadership palestinien. De plus, le titre, indiquant qu’Israël n’est pas intéressé par la paix, implique, d’abord, que les autres le seraient ; et, deuxièmement, qu’Israël s’intéresse à autre chose, telles que l’argent, ou à l’opposé de la paix, c’est-à-dire, à la guerre. Ce n’est là qu’un des nombreux exemples de la façon dont le langage est utilisé pour distordre les perceptions de la réalité, telle qu’elle est sur le terrain. Dans la référence à l’attentat au bulldozer de juillet 2008 mentionné plus haut, le titre du site internet de la BBC était un classique : « Israël tue un conducteur de bulldozer ». Israël, le tueur, a causé la mort d’un Palestinien qui se trouvait être un conducteur de tractopelle. Ce titre est demeuré sur le site de la BBC pour un tour d’horloge complet de 24 h, contribuant à répandre la perception d’Israël comme étant l’agresseur meurtrier de civils innocents, par un complet renversement de la réalité, où Israël a dû se défendre contre des terroristes meurtriers, ce qui se transforme en meurtre et en mutilation de civils pour des motifs ouvertement politiques D’autres exemples abondent, et pas moins, en ce qui concerne ces « maudites implantations ». L’usage du terme « implantation », à l’origine expression positive utilisée pour décrire, par exemple, les nouvelles communautés de l’Ouest américain, est, désormais compris comme un terme péjoratif impliquant une illégitimité et une installation révocable. Ce n’est pas, ici, le lieu de refaire l’histoire légale de ce terme, mais étant donné le fait que la présence d’Israël n’est pas, de prime abord, illégale, comme l’a reconnu le Département d’Etat américain, pas moins, il pourrait être préoccupant que le terme « implantation » soit usité et précédé par d’autres termes, comme « illégale » et « illégitime », comme une sorte de mantra, par beaucoup dans la presse internationale. Ce point est assez simple, puisqu’il n’est pas politique. Une majorité de dirigeants politiques, autant que des citoyens israéliens, sont d’accord sur le fait de renoncer à la plupart de ces territoires en faveur de l’établissement d’un Etat palestinien, comme solution politique à, au moins, une partie du conflit israélo-arabe. Mais il reste sans pertinence, qu’on soutienne ou s’oppose à cette politique ; les journalistes usant d’un autre langage que celui des « territoires disputés » ou d’une terminologie similaire qui reconnaît le statut indéterminé de ces zones, depuis 1947, et les revendications légitimes duales des Israéliens/Juifs et des Arabes/Palestiniens, ici, induisent leurs lecteurs en erreur, portant préjudice contre la position israélienne et juive. On a vu cela, aussi, dans des exemples de reportages sur les efforts des Palestiniens pour aboutir à la reconnaissance de l’ONU en septembre. Le gouvernement israélien a fait entendre clairement, par l’action et des déclarations, qu’il est en faveur de – ou, au moins, prêt à – la création d’un Etat palestinien indépendant et prêt, volontaire et même impatient de négocier une fin au conflit, qui pourrait, non seulement donner naissance à un Etat, mais également assurer son développement et sa réussite. Maintenant, en lisant la plupart des reportages de presse, on peut être excusé de penser que l’Etat juif « s’oppose » à un tel dénouement. Ceci, parce que la plupart des médias simplifie l’opposition d’Israël à des gestes unilatéraux devant l’ONU (que le cercle dirigeant palestinien, lui-même, a défini comme la prochaine étape de son conflit contre Israël, plutôt que comme un pas vers la réconciliation et la paix’), le présentant comme une forme de résistance à l’établissement d’un Etat palestinien, en soi. Lorsque qu’on oublie des subtilités de cette sorte, ou qu’on les laisse de côté, la réalité est déformée et Israël finit toujours par apparaître comme le mauvais garçon. Une Solution réalisableTout n’est pas perdu pour autant. Il existe une réalité objective qu’on peut rechercher et rapporter, à travers les médias et les milieux académiques. On peut prendre des mesures proactives pour aider les journalistes à percevoir le tableau dans son entier, développer une compréhension plus nuancée des complexités de la région, et rapporter des récits avec justesse. Puisque beaucoup de journalistes arrivent en Israël bourrés de conceptions fausses et de préjugés concernant la région, l’antidote le plus efficace est l’observation simple de l’état actuel des affaires courantes. L’histoire de la région, la géographie, le milieu culturel et politique se trouvent juste devant eux – ils ont juste besoin d’une main secourante et crédible pour s’en apercevoir. Un correspondant étranger important a dit, il y a peu, que si l’on offrait aux journalistes en visite une assistance équilibrée et neutre, l’accès à qui bon leur semble et à toutes les franges de l’opinion, la couverture pourrait s’améliorer et pas seulement en ce qui concerne Israël, mais pour tous les récits qui émanent de la région. Il a noté le besoin des reporters de parler à des faiseurs d’information et à ceux dont les voix sont rarement entendues ; d’entendre, non seulement, les porte-parole officiels, mais aussi des individus privés dans toutes sortes de démarches de la vie et des experts sur des sujets variés. La plupart des plus de 450 journalistes étrangers qui travaillent en Israël ne haïssent pas les Juifs ou les Israéliens, mais ils ne savent pas grand-chose d’eux, ni sur Israël ni de l’histoire de la région. Israël peut et doit utiliser la carotte, plutôt que le bâton seulement, dans ses relations avec les médias internationaux – développer les relations avec les journalistes sur le terrain, plutôt que seulement les critiquer pour avoir mal présenté le récit des évènements. Et cela marche. Prenez, par exemple, la couverture des récentes représailles israéliennes contre les attaques de roquettes et missiles depuis Gaza. Ces reporters qui ont fait l’effort de descendre vers la frontière ont rédigé des compte-rendu bien plus équilibrés sur le sujet que ne l’ont fait ceux qui se sont contentés d’assister aux conférences de presse pro-palestiniennes à Gaza, Ramallah et à Jérusalem-Est. Les premiers ont participé à un tour d’horizon du terrain, organisé par MediaCentral, un projet d’HonestReporting à Jérusalem, où on a fourni des contacts, du transport, des briefings sans autre agenda que d’aider les journalistes à développer une compréhension plus nuancée de la complexe réalité. Ce qu’ils ont fait – et rapporté de cette façon, qui comprenait des descriptions détaillées de la situation difficile d’Israël, face à des attaques quotidiennes contre sa population civile, et se focalisant sur ces attaques plutôt que sur les opérations de défense d’Israël. Les derniers, bien sûr, n’ont rapporté que le verbatim des diatribes délivrées par les divers porte-parole, concernant « les attaques illégales, immorales, indéfendables d’Israël contre les Palestiniens de Gaza » et se sont concentrés sur les victimes palestiniennes. On peut dire la même chose pour une myriade de sujets, des problèmes d’environnement aux questions de l’eau dans la Vallée du Jourdain, aux politiques d’Israël vis-à-vis des Bédouins du Néguev, en passant par les manifestations aux frontières du Golan, jusqu’à la coopération dans le high-tech entre hommes d’affaires israéliens, palestiniens et jordaniens. Ou encore découvrir le travail d’assistance du « Cœur Juif pour l’Afrique » ou explorer la coopération économique entre le Gilboa israélien et Jenine, la palestinienne, ou encore rencontrer, de façon informelle, l’israélien ‘moyen » autour d’un café ou apprendre comment Israël est la seule nation sur la planète a accroître sa surface forestière – les journalistes étrangers en Israël sont ouverts à cette nouvelle approche. Ils ont simplement besoin d’un peu d’assistance. Une réalité dangereuse.Les Américains ont seulement besoin de regarder ce que sont les politiques de l’Europe envers l’Iran, le Hezbollah, et le Hamas, ainsi que l’attitude européenne qui prévaut envers les Juifs, Israël et l’Amérique, pour comprendre les implications des tendances actuelles dans les façons de mener des reportages sur Israël et la région. Mais ceci ne doit pas faire cas. En accompagnant et en aidant les journalistes à travers des services leur permettant de rapporter équitablement ce qui se passe sur le terrain, Israël peut aider à assurer que des comptes-rendus plus objectifs mènent à une opinion publique mieux informée et à une meilleure formation politique. Aryeh Green est directeur de MediaCentral, un projet d’HonestReporting situé à Jérusalem, qui fournit des services de soutien pour les journalistes, basés en ou visitant Israël et la Région. www.m-central.org http://www.jewishpolicycenter.org/2500/israel-media Adapté par Marc Brzustowski Copyright © Israël Flash |