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La France et le rêve arabe


La France et le rêve arabe

Intervention en Libye, contacts avec les Frères musulmans égyptiens, pressions sur Israël : La France cède une fois de plus au rêve d’une « grande politique arabe ». Une pulsion irrépressible. Mais qui coûtera cher.

La France fait depuis longtemps un rêve éveillé : Devenir une « grande puissance arabe » ou islamique. Au-delà des intérêts légitimes en Méditerranée ou d’ambitions strictement coloniales – de l’expédition d’Égypte de 1798 au percement du canal de Suez en 1869, de la conquête du Maghreb, de 1830 à 1912, au mandat de 1920 sur la Syrie et le Levant -, c’est bien d’un fantasme fusionnel qu’il s’agit, d’une pulsion romantique et incontrôlée. Gabriel Hanotaux, l’un des grands diplomates de la IIIe République, proche de Léon Gambetta et de Jules Ferry, acquis aux valeurs républicaines laïques, n’hésitait pas à écrire en 1888, dans un état de soudaine sidération, que la France « était la seule puissance européenne capable de coopérer sans heurts avec le monothéisme musulman ».

Un siècle plus tard, la Ve République de Charles de Gaulle, à peine l’Algérie abandonnée au nom du « réalisme », se lançait dans une « politique arabe » qui était l’antithèse même de cette démarche initiale.

Aujourd’hui, la Ve République bis de Nicolas Sarkozy s’emballe à son tour – ce que l’on n’aurait pas attendu d’elle a priori.

Il y a d’abord eu, dès 2007, l’Union pour la Méditerranée (UPM), qui n’a débouché sur rien mais a heurté, par son improvisation et son côté cavalier seul, les autres pays de l’Union européenne, à commencer par l’Allemagne. Puis des « mains tendues » à la Libye de Mouammar al-Kadhafi ou à la Syrie de Bachar al-Assad. Mais avec les révolutions de 2011, le rêve arabe tourne au vertige. Et au déni pur et simple du réel.

En Libye, la France se mêle d’une guerre civile qui la dépasse. Passe encore qu’on s’attaque à un dictateur dont on saluait, peu de temps auparavant, l’assagissement, ou « reconnaisse » un gouvernement rebelle dirigé par l’ancien ministre de l’Intérieur de ce dernier, c’est à dire l’homme qui fut son flic principal.

Au moins aurait-il fallu s’informer, avant d’intervenir, sur l’état réel des forces dans le pays, le poids des régions et des tribus, l’influence des confréries – notamment les Senoussis, liés à l’éphémère monarchie des années 1950 et 1960 – et l’implantation d’Al Qaïda.

Que dire, ensuite, des conséquences sur l’Europe et l’Otan ?

La première a reçu un nouveau coup de canif, puisque l’opération a été décidée et exécutée, derechef, contre la volonté de l’Allemagne.

La seconde n’a pas été mieux traitée. Les Français (et leurs alliés britanniques) ont dû se reposer, comme naguère dans les Balkans, sur la logistique de l’alliance. Mais ils l’ont à peine consultée au préalable. Ce qui n’a plu ni aux autres alliés européens, ni aux Américains, qui en assurent le fonctionnement à 80 %.

En Égypte, le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, a cru bon de décerner le 6 mars, au cours d’un bref séjour, un satisfecit de démocratie aux intégristes : « Le dialogue que j’ai eu … avec des membres des Frères musulmans m’a permis de bien mesurer que la présentation qui est faite parfois de ce mouvement mérite d’être éclairée et approfondie …

Plusieurs jeunes Frères musulmans m’ont fait part de leur vision d’un islam libéral et respectueux des règles démocratiques. »

Sans doute ne savait-il pas que le principal leader de la révolution, l’informaticien Wael Ghonim, directeur de Google Égypte, avait été évincé, dès le 18 février, d’une manifestation célébrant la chute de Moubarak : Au profit du cheikh Yussuf al Qaradawi, chef spirituel des Frères, rentré d’un long exil au Qatar. Ni que celui-ci a justifié, entre autres choses, les attentats-suicides, la Shoah et la mise à mort des musulmans qui embrasseraient une autre religion.

Juppé ne s’est pas non plus inquiété – au moins publiquement – de l’éventuelle remise en question, par un futur gouvernement égyptien « islamo-démocratique » du traité de paix égypto-israélien. Sans doute estime-t-il, comme l’ensemble du Quai d’Orsay, qu’Israël est par définition dans son tort face à tous ses voisins arabes, qu’il doit se retirer au plus vite sur les « lignes de 1967 » (c’est à dire antérieures à 1967), qualifiées de « frontières internationales », et accepter la mise en place, dans les territoires ainsi évacués, d’un État palestinien indépendant co-régi par le Fatah et le Hamas.
Il y a un moyen très simple de vérifier, sur la question israélienne, la sincérité et le sérieux des concepteurs et maîtres d’œuvre de la politique étrangère française. C’est de leur demander pourquoi la République n’a pas installé son ambassade à « Jérusalem-Ouest », quelque part à mi-chemin entre le siège de la Knesset, le musée d’Israël et Yad-Vashem, le mémorial de l’Holocauste : Dans le secteur de la Ville sainte qui, avant 1967, relevait de l’État d’Israël, en fonction du cessez-le-feu israélo-jordanien signé à Rhodes le 24 février 1949.

Et pourquoi les messages officiels français adressés à des personnes ou à des institutions domiciliées dans ce même secteur portent en général la mention : « Jérusalem, via Israël ».

De deux choses l’une. Ou bien la ligne de 1949-1967 est bien une « frontière internationale » : Et dans ce cas la position française sur « Jérusalem-Ouest » est incompréhensible. Ou bien elle n’en est pas une : et dans ce cas la position française est inique.

Exiger qu’Israël se retire sur une ligne qui ne serait « internationale » que pour les Palestiniens mais resterait « de cessez-le-feu » pour les Israéliens reviendrait en effet à s’aligner sur l’idéologie arabe palestinienne la plus extrême et à préconiser le démantèlement de l’État juif.

Le Quai d’Orsay n’en est pas à cette contradiction près.

Mais qu’il sache bien que dans ces conditions, sa capacité d’intervention et de médiation auprès d’Israël ne saurait être bien grande. Même dans ses rêves.

 

Source : Hamodia, par Michel Gurfinkiel 





Psychosociologue, consultant sur les questions de conflits, crises, violences et débriefing dans tous les secteurs où ces problèmes se posent.



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