La liberté d'expression exonère t'elle l'art du respect de la législation? Les artistes ont-ils tout les droits ? Devons-nous tout laisser dire?
Montrer un protagoniste odieux débiter une tirade antisémite suffit-il à dénoncer l'antisémitisme?
Sans doute mais à deux conditions : un auteur exceptionnel et un metteur en scène de talent.
Le théâtre du Rond Point présente en ce moment une pièce de Simon Stephens : « Harper Regan ». L'un des personnages tient des propos violemment antisémites et négationnistes.
A la scène six, dans une tirade extrêmement choquante, un des acteurs injurie les juifs, en dénigrant leur pratique religieuse et en attaquant leur aspect physique. Les propos reprennent tous les poncifs antisémites des périodes les plus noires de notre histoire sur le lobby juif et ses moyens financiers.
" Moi je déteste les juifs … putain parce que avec leur pognon, à se cogner la tête contre le mur des lamentations : si j’étais là-bas je leur arracherais leur kippa de merde, je leur écraserai la tête dans le mur.
Là où j’habite on peut pas bouger tellement y en a, avec leurs fringues bizarres à la con, leur façon de remuer leur petite tête, leurs franges, leur barbe, leurs petits yeux débiles de petites fouines parce qu’y restent trop longtemps à écouter leur musique à la con…. Se lavent jamais »
S’ensuit une diatribe négationniste absolument répugnante :
« Mais rien à foutre de Buchenwald, Auschwitz, putain, ça fait 30 ans qu’on vit à l’ombre de ce truc… Je vais vous dire y eu a des atrocités, des trucs bien pire à des tas d’autres, seulement y possédaient pas tout à fait autant de groupes de presse… »
Ce personnage monstrueux serait, pour les représentants du théâtre, suffisamment abject pour justifier sa présence comme dénonciation de l'antisémitisme, et notre juste émotion en tant que spectateur pourrait obérer notre capacité de raisonnement.
En clair, notre hypersensibilité aux propos antisémite aurait pour conséquence de modifier notre intelligence de la pièce et ainsi provoquer un contresens. Nous serions donc de parfaits crétins, abrutis par des propos compris au premier degré, sans aucune culture théâtrale ! possible…
La qualité de l’œuvre et de la mise en scène sont-elles au service de l’ambition affichée, et suffisamment efficaces pour dénoncer l’antisémitisme d’un abject personnage ? Nous en doutons .
Il est certain que les propos tenus par le personnage sont antisémites. Il est possible que certains spectateurs AVERTIS les comprennent au second degré malgré la pauvreté et le manque de finesse de la mise en scène. Qu’il nous soit permis de demander si tous les spectateurs du théâtre du Rond Point ont compris le sens si bien caché de cette scène.
Nous persistons et affirmons avec la plus grande émotion qu'il est scandaleux que de telles insultes et mensonges antisémites soient proférés, chaque soir, en public, et Europe Israël exige la suspension immédiate des représentations.
Europe-Israël a le plus grand respect pour la liberté artistique et la liberté d'expression en général, mais elle doit s'exprimer dans le cadre strict de la loi, et dans le respect de la dignité humaine et de la non incitation à la haine raciale.
Nous avons donc envoyé des courriers au directeur du théatre, Jean-Michel Ribes, aux ministres de la Culture et de l'Intérieur, ainsi qu'au Maire de Paris, une copie en a aussi été communisquée à l'AFP.
Europe israël et ses sympathisants ont distribué des tracts samedi soir 5 février soir aux spectateurs du théâtre qui les ont lus avec intérêt.
Voir les photos de la distribution de tracts ci- dessous
Danièle Kaplan
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C est une honte, comment le maire de Paris a pu laisser se theatre continuer a divulguer des paroles aussi honteuse. Je n es pas de mot. Moi enfant de la Shoah. J avais pardonner aux Français mais mon coeur regrette.
La France a protesté en 2002 vivement contre les dires de jean-marie le Pen « les camps de concentration comme details de la 2ème guerre mondiale »
2010 contre cette spectacle de haine silence radio ( à part votre action ) …
A notre demande le BNVCA vient de déposer plainte pour antisémitisme.
Bonjour,
Après visualisation de cet extrait, je crois qu’il faut un minimum de second degré.
Avant que l’on me taxe d’antisémitisme, je précise que je suis juif moi-même.
Les propos tenus choquent par leur violence, certes !
Ils sont idiots, c’est entendu !
Je comprends donc l’émotion immédiate des spectateurs, mais la réflexion doit suivre (cependant je ne discute pas de la qualité ou de la médiocrité de l’oeuvre qui à mon avis sont indifférentes au débat)
Il faut analyser la théatralisation pour voir le signifié au delà du signifiant.
Je m’explique.
Qui parle :
Un beauf, habillé comme un beauf (perfecto et cheveux gominés, maintien suffisant) , qui se came et le revendique…une caricature antipathique
Quel est le ton :
Celui de la provocation
Quelle est la tonalité :
gouailleuse, comme celle d’une brève de comptoir (A la manière du directeur du Rond-Point qui n’est autre que Jean-Michel Ribes)
Quelle est l’impression générale qui se dégage du personnage :
Un débile, marginal, camé, caricatural
A qui parle t-il:
A une quadra en rupture de ban incarnée par Marina Foïs.
Dans quel lieu :
Apparemment un bistrot
Une observation : au début de la tirade on voit les yeux de Marina Foïs (excellente comédienne il faut le souligner) exprimant réprobation, rejet, voire dégout pour cet hurlu berlu.
Cependant que recherche t-elle ? un plan cul peut être…pas grand chose sans doute .
Certainement pas un cours de philo, c’est une paumée quadra en pleine crise de doute.
Elle semble se moquer de tout.
Le théâtre n’est pas forcément et ne doit pas être fait pour les spectateurs qui ne réfléchissent pas.
Le nivellement par le bas ne doit pas être une exigence du scénariste.
Enfin, les modes d’expression théatraux sont multiples, et il n’est écrit nulle part que les scénaristes doivent présenter des personnages lisses et consensuels.
On nous donne à voir un con (il y en a dans la vraie vie) et nous sommes assez grands pour comprendre la façon dont il est mis en scène, sans surlignage outrancier.
Je ne crois pas pour ma part que le risque de mésinterprétation, faible à mon avis, permette la censure.
Les antisémites n’ont pas besoin de cet écho pour le demeurer, et ceux qui ne le sont pour le devenir.
Comment à ce compte auriez vous accueilli les saillies desprogiennes tout en troisième degré :
cf google : »On me dit qu’il y a des juifs dans la salle »
Vos récriminations créent un buzz autour de cette pièce dont, faute de l’avoir vue dans son intégralité, je me demande si elle le mérite.
Si le procès est injuste, cela ne signifie pas nécessairement que la pièce soit bonne.
Pour autant elle ne mérite pas d’être étrillée pour ces raisons là.
En dernière analyse, je crois que cette demande de censure est contre-productive, car elle donne des juifs une image qui n’est pas souhaitable.
Je ne crois pas qu’il faille présumer la bêtise des spectateur de théâtre d’une pièce confidentielle par son thème et son auteur, et qui ont choisi de payer leur billet.
Il faut continuer la lutte contre l’antisémitisme vrai et éviter les errances du censeur à tout crin.