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Un autre regard sur le Proche-Orient par Jean-Pierre Bensimon


Un autre regard sur le Proche-Orient par Jean-Pierre Bensimon

Mahmoud Abbas a été la première personnalité étrangère appelée au téléphone par Barack Obama après son installation à la Maison Blanche. Le nouveau président exigeait dans la foulée l’aboutissement d’un accord de paix dans les deux ans. Mais comme pour Guantanamo (il avait exigé sa fermeture en un an) le délai est largement écoulé sans que se dessine la moindre perspective concrète de réalisation.
 Mahmoud Abbas et les siens, les « modérés », ont dès le début refusé toute négociation avec le gouvernement de Netanyahou qui, de son coté, s’était déclaré prêt à entamer immédiatement des entretiens. Après des mois de palabres avec l’envoyé Mitchell, les modérés consentirent à des négociations « indirectes ». Le gouvernement israélien acceptait ensuite pour 10 mois le gel officiel des constructions en Cisjordanie et un gel officieux à Jérusalem Est, pour créer un « climat positif ». Mahmoud Abbas persistait quand même dans son refus d’entrer dans des négociations directes. A la fin août, Hillary Clinton lui forçait la main en convoquant tout le monde à Washington pour entamer un cycle diplomatique dès le 2 septembre, sans conditions préalables de part et d’autre.
Un mois plus tard Mahmoud Abbas rompait ces entretiens parce que Netanyahou ne reconduisait pas sine die le « gel » prévu pour dix mois. Il faisait donc de cette reconduction une condition préalable, ce qui était exclu dans le principe même de ce cycle formulé de la bouche d’Hillary Clinton. Depuis, la position palestinienne soutenue par la Ligue arabe s’est encore durcie: le refus est général (ni négociations directes, ni indirectes) tant que Netanyahou ne se sera pas totalement incliné.
Ce sacré gel de la colonisation
Le refus de négocier à cause de l’interruption du « gel » est-il justifié? Non, pas du tout, pour plusieurs raisons:
– les négociations israélo-palestiniennes ont duré près de vingt sans que cette condition ait jamais été posée auparavant;
– on sait parfaitement que lorsque qu’Israël prend un engagement d’évacuation, constructions ou pas, il l’exécute: les précédents du Sinaï (avec Yamit), du Sud-Liban, de Gaza, des zones B et C de Cisjordanie (soit 95% du total) en témoignent;
– enfin, contrairement à ce que l’on dit, surtout en France, les constructions ne se traduisent pas par une extension du périmètre des implantations. Aux termes d’un accord passé avec G. W. Bush ce périmètre ne varie plus, les constructions se faisant à l’intérieur de l’implantation.
La pléthore des refus palestiniens d’aujourd’hui
Le « gel » ou le « non-gel », on le voit, n’ont aucun effet pratique sur les résultats d’une négociation ni sur l’occupation du terrain. Faire du « gel » une condition préalable n’est qu’une façon de refuser de négocier et une tentative d’humilier le vis-à-vis, ce qui ne manifeste pas non plus un esprit de compromis. C’est un premier refus.
De même, Saeb Erekat, le négociateur palestinien en chef, écrit le 10 décembre dans The Guardian « Aujourd’hui, les réfugiés palestiniens représentent dans le monde plus de 7 millions d’hommes, 70% de la population palestinienne totale. Négliger leurs droits légitimes garantis par la loi internationale, leurs griefs compréhensibles après un déplacement aussi prolongé et leur aspiration au retour dans leur patrie, rendrait certainement un accord de paix signé avec Israël complètement intenable. » Il exprime là un refus non seulement de négocier, mais de tout accord où Israël n’accepterait pas de sacrifier son existence sous le poids de « plus de 7 millions de réfugiés« . Second refus
Un dernier refus tenace des Palestiniens « modérés », c’est le refus de reconnaître Israël comme état juif, ou comme Etat du peuple juif, ou même d’accepter la formule « deux états pour deux peuples » qui était l’esprit même du plan de partage de l’ONU de 1947. Bien sûr « l’état juif » n’est pas un Etat théocratique comme celui de nombreux pays arabes, mais un Etat où les droit religieux sont reconnus et où les citoyens sont soumis à un régime juridique identique. Si Israël tient tant à sa reconnaissance comme Etat juif, c’est pour souligner sa totale souveraineté en dehors de l’aire civilisationnelle des Etats musulmans environnants, et pour être sûr que c’est bien comme tel qu’on le reconnait.
Pourquoi tant d’exigences?
Si une entité pré-étatique comme l’Autorité palestinienne de Ramallah, à première vue si modeste, peut tenir la dragée haute à Israël mais aussi aux Etats-Unis, refuser la voie d’un accord négocié sans même recevoir d’admonestations, c’est qu’elle profite de singuliers appuis.
– il y a d’abord le soutien du monde arabe et même du monde musulman, pour autant que l’Organisation de la Conférence islamique (OCI) le représente. La cause palestinienne est un bon moyen de faire pression sur l’Occident et de disposer avec Israël d’un bouc émissaire protecteur pour des régimes le plus souvent aussi obscurantistes qu’incompétents.
– il y a ensuite le soutien de l’Europe. En s’alignant systématiquement sur le « narratif » palestinien, en accusant en permanence Israël de façon aussi diffamatoire qu’injuste, en finançant les activités en tous genres de nos drôles de « modérés », l’Europe peureuse et inquiète (et la France joue là un rôle de pivot) porte à bout de bras, volens nolens, le refus palestinien et l’éternisation du conflit. Les Etats-Unis, follement désireux eux aussi des bonnes grâces du monde arabe, jouent exactement le même rôle. L’éternisation du conflit et un équilibre stratégique préservant très approximativement l’existence d’Israël.
Mais pourquoi les « modérés » n’ont-ils pas quand même le désir d’en finir avec ce conflit?
– C’est là qu’intervient le paramètre de civilisation: reconnaître que l’Islam n’est plus maître là où il est passé un jour est incompatible avec la vision d’un Islam ayant pour mission divine la conquête inéluctable du monde. Le mélange de tribalisme et de fondamentalisme qui gouverne en général la vision des catégories dirigeantes du monde arabe interdit aussi bien d’accepter l’Autre dans sa différence que l’exercice non totalitaire du pouvoir. Ici, « l’Autre » non acceptable sauf à se nier soi-même, c’est Israël;
– la seconde raison, c’est que tout dirigeant palestinien qui signerait un accord reconnaissant le statut définitif d’Israël passerait immédiatement dans la catégorie des traitres, des koufar, peine de mort à la clé. Qui parmi eux a l’envergure voulue pour expliquer aux Palestiniens que le rêve malicieusement entretenu de la récupération de Tel Aviv, de Haïfa, etc. n’était qu’une illusion ?
– la troisième grande raison, c’est que la perpétuation du conflit constitue une assurance financière pour les « élites palestiniennes modérées ». Outre l’ivresse que vous donnent les égards et un accueil princier dans les forum internationaux où l’on ne parle que de vous, le conflit fait couler à flot dollars et euros dans les poches de ces élites pour qui le terme « corruption » n’existe pas en arabe. Et si le fleuve se tarit, il suffit d’un peu de violence sur le terrain, de manifestations, d’attentats, de provocations, pour qu’il se reconstitue providentiellement. Qu’arriverait-il à ces élites si leur revenus s’indexaient sur ceux de leur peuple et de leur vraie compétence de « gouvernance »?
Le processus de paix, c’est la guerre
Le tableau à peine esquissé ici montre que des forces complexes et puissantes poussent aujourd’hui à la pérennisation du conflit israélo-palestinien, en fait un conflit israélo-arabe dont le paramètre palestinien tout à fait annexe masque la vraie nature. L’existence d’un conflit, ce n’est pas la guerre. En réalité un équilibre plus ou moins provisoire s’établit, car personne d’un coté comme de l’autre n’a intérêt à tenter de l’emporter, du moins depuis 1967 et 1973. Par contre, dès que l’on exerce une pression pour formaliser dans le marbre une solution définitive, on met toutes les structures de pouvoir du monde arabe dans une situation intenable, on les oblige à renier officiellement les bases idéologiques et religieuses du rêve hégémonique qui leur sert d’assise.
Bill Clinton a acculé Arafat à être autre chose qu’un chef tribal à Camp David. Il s’en est suivi l’épisode sanglant de l’Intifada. GW Bush II a obtenu l’évacuation de Gaza et la légitimation du Hamas, créant avant de prendre une juste retraite un problème insoluble de plus. Quant à Obama, sans égaler encore ses prédécesseurs, il a pavé la voie de la radicalisation de la Turquie et des « modérés » de Ramallah, tout en laissant l’électron libre iranien en état de faire exploser le régime de basse intensité du conflit. Forcez le « processus de paix », forcez les semi équilibres péniblement acquis, et vous aurez surement la guerre chaude, messieurs les Occidentaux. Faute de quitter mentalement Oslo et le phantasme de la paix westphalienne, vous obéirez à l’adage: Errare humanum est, perseverare diabolicum.

 

Lettre de FIM13, le 3 janvier 2011

Ashkel







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