par Jean-Pierre Bensimon, pour Objectif-info, le 4 janvier 2011
Il ne faut pas escamoter l’abstention française du 23 décembre 2010 dans le vote de l’assemblée générale de l’ONU sur la tenue d’une nouvelle conférence de suivi, dite Durban 3 en septembre 2011. Le vote d’adoption de cette initiative s’inscrit naturellement dans la continuité des majorités automatiques de l’ONU. Un projet est préparé par l’Organisation de la Conférence Islamique ou l’un de ses prête-nom. S’il concerne Israël d’une façon ou d’une autre, il est automatiquement voté par les anciens non-alignés, qui en guise de non-alignement, font plutôt penser à une rangée de poireaux droits dans leurs bottes. Un ancien premier ministre israélien avait eu un bon mot, remarquant qu’avec ce genre de majorité, on pourrait voter une résolution stipulant que la terre est plate.
Le score final obtenu par le document A/65/454 sera donc de 104 pour, 22 contre et 33 abstentions. Si les 104 « pour » n’appellent aucun commentaire supplémentaire, les 22 « contre » et surtout les 33 abstentions sont très riches d’enseignements.
Les pays qui ont voté « contre » sont : l’Australie, la Bulgarie, le Canada, la République tchèque, le Danemark, l’Estonie, l’Allemagne, Israël, l’Italie, la Lettonie, la Lituanie, les Iles Marshall, Micronésie, les Pays-Bas, les Palaos, la Pologne, la Roumanie, la Slovaquie, la Suède, la Macédoine, le Royaume-Uni et les Etats-Unis.
Quel a été le message des « contre »? Le refus clair d’une manipulation trop ostensible, en fait d’un acte de force de l’OCI pour monopoliser l’espace politique international en ressassant ses sempiternelles accusations. La conférence de suivi de Genève, dite Durban 2, date d’avril 2009. On avait attendu près de huit ans pour passer de Durban 1 à Durban 2, et voila que l’on va aller à Durban 3 après seulement deux ans et 4 mois. En quelque sorte, les 22 ont dit : « Ca suffit ! »
Les Américains ont une raison de plus d’être irrités: Durban 3 se tiendra à New York une dizaine de jours après la commémoration du 10ème anniversaire de leur grand deuil national contemporain, celui des victimes du 11 septembre. La conférence Durban 3 fait office de pied-de-nez sur les lieux même du grand crime islamiste, un peu à la manière de la fameuse mosquée qui doit être construite dans la périmètre de Ground Zero. Ces provocations répétées ne manqueront de radicaliser un peu plus l’opinion américaine dont les avis sur l’Islam sont de plus en plus négatifs. Les islamistes en costume diplomatique trois pièces poursuivent sur le sol américain la stratégie d’affrontement des civilisations entamée par les fanatiques-suicide depuis au moins le 11 septembre, en réalité bien avant.
Et que nous dit le vote d’abstention, celui de la France par exemple? Ceux qui se sont abstenus ne pouvaient pas s’aligner sur la majorité automatique, car d’un point de vue occidental cette conférence est une provocation: provocation contre les Américains, provocation contre le tabou de l’antisémitisme dans les arènes officielles. Mais refuser de voter « contre », s’abstenir, signifie aussi que l’on ne veut pas essuyer le regard sévère des initiateurs de l’opération, le monde des dictatures, des théocraties, de tout ce que planète compte d’entités totalitaires. On leur donne ainsi des gages d’une certaine soumission, on leur assure une certaine honorabilité politique. Dans le cas français, on croit gagner peut-être le rôle mondial de grand intermédiaire entre l’Orient et l’Occident. C’est cette illusion nationale française, plus vivace depuis de Gaulle, qui a guidé ce vote d’abstention. Le rêve de devenir ainsi l’acteur incontournable de la scène mondiale comme si les dictatures connaissaient autre chose que le rapport de forces brut que la France ne peut assurer coupée de ses alliances.
Car plus intéressant encore pour nous français, c’est l’analyse du vote des 27 pays européens.
On voit que l’Europe s’est profondément divisée 14 pays de l’Union européenne ont voté « contre » et 13 pays se sont abstenus. On observe que les « poids lourds » européens, Allemagne, Royaume Uni, Italie se sont séparés de la France.
On a là la reproduction parfaite du scénario de Durban 2. Déjà le Canada, les États-Unis, l’Italie, l’Australie, les Pays-Bas, l’Allemagne, et la Pologne, entre autres, avaient boycotté la conférence onusienne. C’est une activité diplomatique fébrile de la France jusque dans la nuit de l’ouverture de la session de Genève qui avait empêché l’Union européenne dans son ensemble de boycotter la grande messe islamiste.
On voit ainsi que quand les Etats islamistes exagèrent, quand une réaction occidentale de résistance et de raison s’amorce, la France la torpille, quitte à briser ce qu’elle dit être sa grande priorité, l’unité de l’Union européenne. Ce comportement est profondément affligeant. Les messes diplomatiques onusiennes en tous genre, assemblée générale de l’ONU, Conseil des droits de l’Homme, UNESCO, suent le racisme et l’antisémitisme par tous leurs pores et incriminent immanquablement Israël et le sionisme. Durban 1 marquait la grande irruption du nouvel antisémitisme, une nouvelle époque dans la continuité des rassemblements de Nuremberg de Hitler.
Mais dès 2001 et comme toujours, l’incrimination des Juifs, donc d’Israël, ne faisait que masquer un affrontement plus vaste et plus profond, la contestation générale des positions et des valeurs occidentales par les totalitarismes émergents. Si on lit les documents préparatoires et les résolutions de Durban 1 et Durban 2, on observe que la grande majorité des accusations et des mesures préconisées s’en prennent prioritairement à l’aire culturelle occidentale, Israël ni les Juifs ne venant qu’en second. Dans son discours de Genève, Ahmadinejad n’a pas tant attaqué les Juifs ou Israël que l’Occident à qui il a signifié sur tous les tons son déclin, sa décrépitude et sa fin prochaine La stratégie islamiste est provisoirement appuyée par les « émergents » Chine, Inde, Brésil. Tous veulent ligoter l’Occident, réduire son influence et le bouter hors de ses positions là où il est présent. Nicolas Sarkozy devrait prendre en compte cet aspect des choses, car il risque bien de n’être que le petit jouet des très encombrants alliés dont il recherche les faveurs.
http://www.objectif-info.com/index.php?id=762