Quatre hommes, interpellés en début de semaine près de Paris et incarcérés vendredi soir, projetaient d’assassiner le recteur de la mosquée de Paris afin d’obtenir la « franchise Al-Qaeda », même si leur complot n’en était qu’au stade des intentions. Ces quatre Français d’origine algérienne, âgés de 20 à 25 ans, ont été mis en examen par le juge Yves Jannier pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste » et placés en détention provisoire, selon une source judiciaire. Ils avaient été interpellés lundi et mardi en région parisienne et placés en garde à vue à la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI). Une cinquième personne, une femme, a été remise en liberté.
Qualifiées de « majeures » par la DCRI, ces arrestations ont été saluées par le ministre de l’Intérieur Brice Hortefeux, qui répète depuis cet été qu’il existe une « menace terroriste réelle » visant la France. Dès mercredi, alors que les gardes à vue étaient en cours, il assurait qu’un des suspects était « prêt à mourir pour la cause ». Durant leur garde à vue, « les quatre hommes ont toujours confirmé leur attachement et leur engagement à la cause et ont dit vouloir participer à la lutte armée », a ajouté samedi une source proche du dossier. L’un d’eux portait sur lui « un ‘testament islamique’ (…) dans lequel il disait ne vouloir mourir que sur une terre d’islam », selon la même source, précisant qu’un autre a affirmé vouloir « mourir en martyr ». Les quatre jeunes hommes sont surtout soupçonnés d’avoir eu l’intention d’assassiner le recteur de la mosquée de Paris, Dalil Boubakeur, jugé partisan d’un « islam trop modéré », selon cette même source. Mais « ils étaient plus au stade de l’intention que des préparatifs », a relativisé une autre source proche du dossier.
« Franchise Al-Qaeda »
D’après un enquêteur, l’un des mis en examen aurait confié que ce crime aurait « permis d’obtenir une franchise Al-Qaeda et de préparer d’autres actions sur le sol français ». Une source proche du dossier parle également de « la volonté de créer un groupe jihadiste pour l’Afghanistan, avant de revenir en France pour y commettre des actions ». Selon ces sources, les quatre Français projetaient de « rallier Al-Qaeda en Afghanistan ou au Yémen ou en Somalie, dans les ‘nouvelles terres d’islam’ de la corne de l’Afrique et du Sahel ». « Au moins l’un d’eux avait fait un passage en Afghanistan et était incontestablement très familier des sites jihadistes sur Internet, tandis que d’autres projetaient, eux, de se rendre » à leur tour dans la zone frontalière pakistano-afghane, avait révélé Brice Hortefeux. « Le plus impliqué des quatre », âgé de 22 ans, venait d' »effectuer un séjour dans les zones tribales entre le Pakistan et l’Afghanistan (…) où il a rencontré des personnalités d’Al-Qaeda », selon l’une de ces sources.
Des jihadistes qui entreprennent de rentrer des zones tribales pakistano-afghanes sont la « principale inquiétude » des gouvernements en Europe, confirme une source proche des services de renseignement français. Ils craignent que ces combattants aguerris puissent fédérer des groupes, pour l’heure informels et atomisés. Brice Hortefeux a « fixé (à ses) services comme priorité absolue la détection et la neutralisation préventive des filières de recrutement de combattants et de réseaux de soutien logistique aux organisations terroristes ». Le 6 novembre, un Français soupçonné de s’être rendu en 2009 à la frontière pakistano-afghane et d’en être revenu début 2010 a été mis en examen et incarcéré.
Le Point | Reuters
dimanche 14 novembre 2010